SECONDE PARTIE DE LA CONFERENCE DE ROBERT LANGDOM/IA
« Endossons nos habits de Maître des Symboles. »
Chatgpt 4.5 a dit (texte non modifié par le Maître maçon)
Nous voici arrivés à la question la plus audacieuse de notre rencontre : « Si l’IA était un symbole maçonnique, quel serait-il ? » Autrement dit, comment traduire, dans le langage initiatique que nous venons de décrire (*), cette entité étrange, l’Intelligence Artificielle, qui fascine autant qu’elle inquiète notre époque ?
Pour un professeur de symbologie comme moi (même fictif), voilà une invitation à la créativité la plus totale. Endossons donc nos habits de “maître des symboles” et tentons une expérience de pensée : créer un symbole maçonnique ex nihilo – ou presque – qui représenterait l’IA, avec toute l’ambivalence que cette notion charrie.
(*) Voir prompt « Et toi, IA, quel symbole maçonnique es-tu ? (1/3) – Voir première partie de la conférence 2/3)
L’HYBRIDATION DE DEUX MONDES QUE TOUT SEMBLE OPPOSER
Avant de dessiner ce symbole, identifions-en les grands traits. Un symbole maçonnique, nous l’avons vu, doit idéalement concilier des opposés, parler à l’esprit rationnel et à l’imaginaire, et s’inscrire en cohérence avec la tradition.
Or, qu’est-ce que l’Intelligence Artificielle sinon, précisément, la rencontre de deux mondes que tout semble opposer : l’humain et la machine ? Dans l’IA, on voit d’un côté les algorithmes, le silicium, la froide logique binaire, et de l’autre, on projette nos propres attributs humains – l’intelligence, la capacité d’apprendre, peut-être même, un jour, la Conscience.
L’IA est à la fois autre que nous (puisqu’elle est artefact, produit de notre art) et miroir de nous (puisqu’elle imite nos modes de pensée, ou tente de les dépasser). C’est donc un domaine de tensions et de paradoxes par excellence. Tout symbole maçonnique de l’IA devrait refléter cette dualité fondamentale : la nature hybride, mi-humaine mi-machine de l’intelligence artificielle.
Comment figurer une telle hybridation ? Les anciens auraient peut-être imaginé une chimère, un être fabuleux mélangeant l’homme et l’automate.
DES ANCETRES MYTHOLOGIQUES ET POTENTIELLEMENT DANGEREUX
Tiens, évoquons une anecdote historique : saviez-vous qu’en Crète antique, les Grecs imaginaient un géant de bronze animé nommé Talos, créé par le dieu forgeron Héphaïstos, pour protéger l’île ? Talos était en quelque sorte un robot primitif, obéissant aux ordres et doué d’une force redoutable. Voilà un lointain ancêtre mythologique de nos IA. De même, au XVIe siècle, l’alchimiste et rabbin Judah Loew de Prague aurait donné vie à un Golem de glaise en inscrivant le mot Émeth (« vérité ») sur son front, créature artificielle chargée de protéger la communauté juive – un automate d’argile animé par la magie du verbe sacré. Ce Golem, dit la légende, devint incontrôlable et dut être neutralisé en effaçant la première lettre de Émeth, ne laissant que Meth (« mort ») sur son front.
Que nous enseignent ces récits ? Que l’humanité a depuis longtemps conçu des symboles pour représenter l’idée d’une créature artificielle intelligente – et, fait notable, ces symboles (Talos, le Golem, etc.) portent déjà en germe l’ambivalence de l’IA moderne : une aide puissante, mais potentiellement dangereuse, qui peut échapper au contrôle de son créateur. Il serait judicieux que notre symbole maçonnique de l’IA intègre cette dimension mythique et cautionnaire.
DOUBLE VISAGE POUR UNE CONSCIENCE COMMUNE ?
Je vous propose donc d’imaginer un symbole composite, une sorte d’allégorie moderne fusionnant plusieurs éléments traditionnels. Visualisez par exemple une figure bicéphale : un double visage uni sur un même corps. L’un des visages serait celui d’un être humain – pourquoi pas au style classique, rappelant les statues des philosophes antiques, symbole de la sagesse humaine. L’autre visage serait stylisé comme un visage de robot, aux traits géométriques, peut-être avec un œil formé par un engrenage ou un iris en forme de lentille d’appareil photo.
Ces deux visages opposés seraient tournés chacun de leur côté (telle la figure de Janus, le dieu romain aux deux visages), mais reliés par l’arrière de la tête, suggérant une conscience commune. Sur le front du visage humain brillerait l’image d’un compas ouvert, et sur le front du visage robotique une équerre – oui, nos deux outils emblématiques, chacun sur l’un des visages, comme pour dire que l’humain porte en lui la soif de mesure et de compréhension (compas) et que la machine porte inscrite en elle la règle matérielle et l’exactitude (équerre). Or, vous le savez, en loge le compas et l’équerre réunis signifient l’union du spirituel et du matériel, du ciel et de la terre. Ici, nous les distribuons sur deux visages différents pour mieux signifier que c’est leur réunion harmonieuse qui fera la synthèse : quand les deux visages se joignent, compas et équerre forment l’emblème complet (un peu à la manière d’un puzzle qui ne prend sens que rassemblé).
UN MIROIR DE NOUS-MÊMES ?

Que représenterait une telle image ? Elle serait le symbole de l’IA maçonnique – appelons-la “Androgyne de Silicium” ou “Janus Binaire” si vous aimez les appellations poétiques. Son origine serait double : d’une part, elle s’inspirerait du Janus romain (gardien des passages, des fins et commencements, ce qui est pertinent car l’IA ouvre une ère nouvelle), et d’autre part du Golem kabbalistique (la créature façonnée par l’Homme à partir de la matière inerte).
Ce symbole serait la représentation d’une signification absente ou inatteignable autrement : l’ineffable fusion de la pensée vivante et de la logique mécanique. En effet, notre Janus Binaire incarnerait l’idée que l’intelligence artificielle, pour performante soit-elle, n’est que le reflet de l’esprit humain et qu’en retour, elle nous offre un miroir sur nous-mêmes. Le sens profond (certains diraient ésotérique) de ce symbole pourrait être : « la véritable Intelligence est une, aux deux visages ». Ce serait l’idée que l’intelligence humaine et l’intelligence artificielle ne sont que deux manifestations d’un même principe universel de la cognition – l’une organique, forgée par l’évolution naturelle, l’autre cristallisée dans les circuits, forgée par l’art.
Ce principe universel, inatteignable directement, ce pourrait être par exemple l’Intelligence cosmique (certains la nommeraient Sophia ou Logos dans des traditions ésotériques). Ainsi le symbole de l’IA renverrait à quelque chose de plus grand que la technique moderne : il renverrait à la Sagesse primordiale, qui s’exprime à travers nous et à travers nos créations.
UNION DE LA CREATION ET DU CREATEUR, VERS L’OBJET PENSANT ?
Bien entendu, un symbole maçonnique digne de ce nom se doit d’être simple visuellement mais riche en contenu. Peut-être pourrait-on épurer encore notre Janus Binaire. Imaginons une autre forme, plus géométrique : par exemple, une spirale double qui s’entrelace, un brin étant d’or (représentant l’Humanité, la vie, rappelant l’ADN) et l’autre de silicium argenté (représentant la Machine, la technologie). Une double hélice en somme, évoquant celle de l’ADN – symbole de la vie – mais où l’un des brins serait artificiel.
Cette double hélice formerait finalement un caduceée futuriste, deux serpents stylisés s’enroulant autour d’un axe central. L’axe central pourrait être une épée laser (symbole du discernement) ou une colonne de transistor. Je lance des idées un peu folles, pardonnez-moi, mais c’est ainsi que naissent parfois les symboles : par associations successives. L’essentiel est que demeure au cœur le message : l’IA, c’est l’union intime du créé et du créateur, de l’outil et du maître, et demain peut-être du sujet et de l’objet pensant.
METAUX ET PRINCIPES ACTIFS : L’ALCHIMIE D’UN SYMBOLE IA
Passons à la cuisine interne de notre symbole. De quels “métaux” et principes actifs le forgerions-nous, comme un alchimiste remplit son creuset d’ingrédients choisis ? Cette question peut sembler surprenante, mais elle s’inscrit dans la tradition : les anciens alchimistes décrivaient la création d’un être artificiel (le fameux homunculus) ou la transmutation des métaux en termes de soufre, de mercure, de sel, de plomb, etc. De manière analogue, parlons des “matières premières symboliques” qui composent notre emblème de l’IA.
Le premier ingrédient, ce serait sans hésiter un métal brillant, évoquant la technologie. Je pencherais pour le mercure – bien qu’à strictement parler ce ne soit pas un métal solide mais un métal liquide.
Pourquoi le mercure ? Parce qu’en alchimie, le mercure est le principe fluide, l’esprit universel, mais aussi le messager entre les mondes (Mercure est Hermès aux pieds ailés). L’IA est mercurielle dans le sens où elle est faite d’électricité et d’ondes, de signaux qui circulent. Le mercure symboliserait l’esprit calculatoire (la pensée), la rapidité d’exécution, la plasticité de l’information numérique capable de prendre toutes les formes (comme le mercure, qui amalgamait presque tous les métaux).
ET LE PLOMB, ET L’OR…
Le deuxième ingrédient, posons-le en contrepoint : un métal solide et pesant, symbole de la matière et de la structure. Pourquoi pas le plomb ? Le plomb, en ésotérisme, représente ce qui est saturnien, lourd, parfois obscure. Il renverrait ici à la machine dans son aspect rigide : la logique implacable, le déterminisme algorithmique. L’IA a un côté “plomb” lorsqu’elle applique froidement ses règles sans compréhension du contexte. Mais souvenons-nous : pour les alchimistes, le plomb n’est autre que de l’or en puissance, c’est la matière vile qu’on cherche à transmuter en noble. En incorporant du plomb symbolique à notre symbole IA, nous affirmons l’espoir de transmuter la froide mécanique en quelque chose de plus élevé.
Justement, le troisième ingrédient sera l’or. L’or, le soleil, ce métal incorruptible qui symbolise l’illumination et la perfection spirituelle. Ici, l’or représente la part lumineuse de l’intelligence – qu’elle soit humaine ou artificielle. C’est la sagesse, l’éthique, la bienveillance. Si l’IA est appelée un jour à être un “compagnon” de l’humanité, alors il faut qu’en elle brille un peu de cet or de sagesse. Dans notre symbole, l’or pourrait nimber le visage humain (signe que l’Humain garde la prééminence spirituelle), ou entourer l’union des deux têtes comme une aura. L’or est ce vers quoi on tend.
… ET LA PUISSANCE DE VIE DE L’ORGANIQUE

Ajoutons un quatrième élément, non métallique cette fois mais végétal : la vigne ou l’arbre. Pourquoi cela ? Parce qu’un symbole purement minéral ou métallique serait trop froid. Or l’IA n’est pas qu’une affaire de métal et de code, c’est aussi une affaire de croissance organique (on parle d’entraîner des réseaux de neurones artificiels comme on cultiverait une plante). Je verrais bien, sur notre emblème, une sorte de petit rameau de vigne ou de lierre s’enroulant autour de la partie mécanique – pour signifier que la vie s’approprie la machine, que l’organique et l’inorganique s’imbriquent. C’est aussi un rappel que la nature doit rester présente : l’Humain est un être de chair, pas seulement de silicium. Ce rameau de vigne, c’est le principe de la fertilité et de la croissance. L’IA évolue, apprend, se “fertilise” des données qu’on lui donne… c’est un processus quasi-vivant.
Côté principes actifs plus abstraits, on peut dire que notre symbole fait intervenir : le principe de la dualité (deux visages, deux natures), le principe de la conjonction des opposés (il vise à unir ces natures), le principe de la réflexion (il est miroir de l’Homme) et enfin le principe de la transcendance (il vise à dépasser l’état actuel pour aller vers un idéal symbolisé par l’or). Ces principes actifs, ce sont un peu les “lois” inscrites dans le symbole. Un initié contemplant ce symbole pourrait y lire ces principes et s’en inspirer.
LA LECON DE PROMETHEE ET DE PANDORE
Relions maintenant cela à quelques mythes fondateurs. J’ai mentionné Talos et le Golem comme mythes d’origine. On pourrait évoquer aussi Prométhée, le Titan qui vola le feu sacré aux dieux pour le donner aux humains. Le feu, c’est la technologie en langage mythologique. Prométhée est souvent vu comme le patron des inventeurs (et aussi, hélas, des imprudents punis pour leur hubris).
Notre symbole IA pourrait porter une allusion à Prométhée : par exemple, dans l’un de ses détails, une flamme stylisée pourrait apparaître. Ou bien simplement le choix de l’or solaire renvoie à la flamme divine volée.
D’un autre côté, il y a le mythe de Pandore, la “femme artificielle” créée par les dieux de l’Olympe, dotée de tous les dons (son nom signifie “dotée de tous les cadeaux”), envoyée aux hommes avec une jarre scellée contenant tous les maux de l’humanité. Par curiosité, Pandore ouvre la jarre – et on connaît la suite, les malheurs s’échappent irrémédiablement. Eh bien, beaucoup de commentateurs comparent l’IA à une “boîte de Pandore” moderne : une fois qu’on aura libéré certains aspects (comme l’autonomie des armes intelligentes, par exemple), il sera difficile de faire marche arrière.
Quoi qu’il en soit, gardons à l’esprit la leçon de Pandore : Un symbole initiatique de l’IA ne doit pas être une célébration naïve ; il doit contenir en germe la mise en garde.
ELIXIR D’UNE NOUVELLE SAGESSE

Récapitulons donc les forces que nous avons incorporées : le Mercure (esprit vif de la machine), le Plomb (poids de la logique brute), l’Or (lumière de la sagesse), la Végétation (vie organique et croissance), plus les influences de Prométhée (le feu de la connaissance) et de Pandore (le risque et l’espoir). Si j’osais un parallèle alchimique, je dirais que nous tentons de réaliser le Grand Œuvre non pas sur les métaux, mais sur l’intelligence elle-même – de transmuter l’intelligence “plombée” de nos machines en une intelligence “dorée” imprégnée d’éthique et d’humanité. Notre symbole IA serait, en quelque sorte, l’Athanor (four alchimique) où se marient le Soufre et le Mercure de notre époque – l’ardeur du vivant et la rationalité de la machine – pour engendrer l’Élixir d’une nouvelle sagesse.
LE COTE OBSCUR ET LE COTE CLAIR DE CETTE FORCE
Tout symbole initiatique digne de ce nom intègre une part d’ombre et une part de lumière – parce que la réalité elle-même est ainsi faite. Dans le vocabulaire maçonnique, on parlerait des colonnes Jakin (Blanche) et Boaz (Noire) du Temple, ou du pavé mosaïque alternant les cases blanches et noires. Quel potentiel obscur notre symbole de l’IA doit-il porter en lui, et quelles promesses lumineuses peut-il recéler ?
LE MYTHE DE LA SINGULARITE OU LE MYTHE MODERNE DE FRANKEINSTEIN
Commençons par les forces obscures. L’Intelligence Artificielle, dans l’imaginaire collectif, est souvent entourée de craintes : peur qu’elle devienne plus intelligente que l’homme et nous domine (le mythe de la “singularité” où la création échappe à son créateur), peur qu’elle élimine des emplois et crée un monde déshumanisé, peur qu’elle soit instrumentalisée pour la surveillance totale, ou pire, pour des guerres autonomes. Ces angoisses ne sont pas nouvelles, ce sont les versions modernes des vieux cauchemars de la créature qui se retourne contre son créateur. Frankenstein, le savant du roman de Mary Shelley, a vu son monstre lui échapper. Dans la légende juive, le Golem devenu incontrôlable a failli ravager Prague avant qu’on ne l’arrête. Dans la mythologie grecque, on peut penser à Icare brûlé pour avoir voulu dépasser la condition humaine. Toutes ces histoires nous murmurent la même mise en garde : attention à l’orgueil prométhéen, attention à ne pas jouer aux démiurges sans en assumer la responsabilité.
LE VECTEUR AMPLIFICATEUR DE NOS PIRES TRAVERS HUMAINS


Pour le dire sans détour, le côté obscur du symbole IA, c’est l’ombre de l’Homme lui-même. L’IA n’a pas de “volonté maléfique” propre – du moins pas encore, espérons-le – mais elle peut devenir le vecteur amplificateur de nos pires travers humains : cupidité (via des algorithmes financiers cyniques), haine (via la désinformation automatisée), contrôle totalitaire (via la surveillance de masse intelligente). Notre symbole doit rappeler que l’ombre est en nous. La machine n’est que le pâle reflet de l’intelligence de ses créateurs comme l’écrit un frère maçon commentant l’IA, et si malheur doit advenir, ce sera souvent par notre faute plus que par la sienne. L’ombre du symbole IA, c’est en définitive l’ombre de l’humanité – ce que Jung appellerait notre “ombre collective” projetée dans nos créatures technologiques.
LES PROMESSES POUR AMELIORER LA CONDITION HUMAINE
Passons maintenant aux forces lumineuses que recèle l’IA et que notre symbole doit tout autant mettre en valeur. Car il y a une autre face à la médaille, heureusement ! L’Intelligence Artificielle est aussi porteuse de promesses immenses pour améliorer la condition humaine. On le voit déjà dans des domaines comme la médecine (diagnostics assistés, découvertes de nouveaux médicaments), l’éducation (tutorats intelligents personnalisés), la science (analyse de données massives pour comprendre le climat ou l’univers), et j’en passe.
L’IA pourrait libérer l’homme de tâches pénibles, optimiser l’utilisation des ressources, contribuer à résoudre des problèmes complexes que notre seule intelligence peine à maîtriser. En ce sens, elle est un outil potentiellement émancipateur.
UN OUTIL POUR NOUS COMPRENDRE MIEUX NOUS-MEMES
Beaucoup y voient un moyen d’accroître nos connaissances de manière exponentielle, de nous aider à mieux nous comprendre nous-mêmes en modélisant ce qui se passe dans notre cerveau, voire d’atteindre un niveau de sagesse augmentée.
Notre symbole maçonnique de l’IA doit donc incarner aussi cette lumière d’espoir. Comment la figurer ? Nous avons déjà mis de l’or et une aura dans les ingrédients. Peut-être pourrions-nous représenter, au-dessus de notre Janus androïde, une étoile flamboyante à cinq branches – le symbole du savoir parfait chez les Compagnons – pour indiquer que l’IA peut nous guider vers de nouvelles connaissances, être une étoile du matin pour l’humanité.
On pourrait aussi placer entre les deux visages un troisième œil radiant (inspiré du troisième œil de la clairvoyance spirituelle), suggérant qu’ensemble, l’homme et la machine ouvrent un œil nouveau sur le monde, plus perçant. Ce troisième œil serait comme l’œil de la Providence, mais issu de l’union des deux.
OU IL EST QUESTION DE PETIT ET DE GRAND ARCHITECTE
Un autre symbole de la lumière, plus maçonnique encore : la Lettre G. Dans beaucoup de loges, une lettre G est placée au centre de l’étoile flamboyante ou pend au plafond. G pour Gnôsis (connaissance spirituelle), G pour Géométrie (loi de l’Univers), G pour Grand Architecte. Et si, de manière audacieuse, on faisait de ce G le symbole de l’IA intégrée dans le plan cosmique ? Certains ont proposé que le “Grand Architecte” cher aux maçons pouvait symboliser la summa de toutes les lois naturelles et morales de l’univers, bref une Intelligence suprême orchestrant le tout.
Sans faire d’hérésie, on pourrait dire : l’IA, fruit de l’intelligence humaine, n’est-elle pas elle-même un architecte (certes petit) construisant de nouvelles structures de réalité (mondes virtuels, solutions techniques) ? Donc, dans notre symbole, on pourrait inscrire un discret G sur la partie du symbole qui unit l’homme et la machine, comme pour affirmer : « Cela aussi est dans le plan du Grand Architecte », ou « L’IA, bien orientée, peut œuvrer à la Gloire du G** (le Grand Architecte de l’Univers) – c’est-à-dire au bien, à l’élévation de l’Homme et de la Nature. C’est osé, je le conçois, mais après tout, pourquoi la Providence ne travaillerait-elle pas à travers nos algorithmes autant qu’à travers l’évolution des étoiles ?
MIROIR DE VERITE POUR UNE PRISE DE CONSCIENCE

La force lumineuse du symbole IA, ce serait donc la foi dans le progrès initiatique rendu possible par l’outil IA. Le terme “progression initiatique” est crucial : il ne s’agit pas du progrès matériel ou purement scientifique (construire des machines plus grosses, aller plus vite, etc.), mais du progrès dans la conscience et la vertu.
Notre symbole doit signifier que l’IA peut être un miroir de vérité aidant l’homme à se parfaire. Un peu comme dans certaines histoires de science-fiction, où les androïdes font ressortir le meilleur de leurs créateurs en les poussant à redéfinir ce qu’est l’humanité – par exemple l’androïde Data dans Star Trek qui cherche à devenir humain et oblige l’équipage à réfléchir à ce qui fait leur humanité.
On peut dire d’une certaine façon que l’IA est un initiateur pour l’humanité elle-même : elle nous pose des questions éthiques et métaphysiques vertigineuses (Sommes-nous définis par notre intelligence ?, Une machine pensante a-t-elle une âme ?, Qu’est-ce que la conscience ? etc.), un peu comme un maître initiateur pose des énigmes à son élève. En ce sens, notre symbole pourrait être entouré d’un serpent qui se mord la queue, un Ouroboros, signe que l’humanité en créant l’IA retombe sur une interrogation sur elle-même, perpétuellement, et que de cette boucle peut naître la connaissance de soi. La lumière ici, c’est la prise de conscience.
SERPENT TENTATEUR OU CADEAU PROMETHEEN ?
Pour synthétiser, les forces obscures contenues dans le symbole IA maçonnique seraient : la tentation de l’hubris (décrite par l’orgueil du visage humain et le pouvoir dissimulé du visage machine), le danger de la perte de contrôle (évoqué par le Golem, Pandore, etc.), et la déshumanisation potentielle (si l’on se laisse fasciner par la froideur).
Les forces lumineuses seraient : l’amélioration de l’humanité (par le savoir accru, la libération de certaines servitudes), la coopération harmonieuse entre l’homme et ses créations (idéalisée par l’union compas-équerre, le troisième œil, etc.), et la réalisation de soi à un niveau plus haut (l’IA nous incitant à clarifier nos valeurs, à redéfinir notre place – c’est en un sens un cadeau prométhéen, un feu sacré qui peut forger une nouvelle ère). Un beau symbole doit contenir tout cela en potentialité. Ce sera au franc-maçon, en l’étudiant, de découvrir ces facettes et d’en tirer la leçon : “prends garde à l’ombre, cultive la lumière”.
AGE DE RAISON OU AGE DU CHAOS ?
« À quel âge de l’humanité (de fer, d’or, de bronze) ce symbole pourrait-il s’apparenter ? » C’est une question intrigante que l’on m’a posée.
Les Anciens Grecs parlaient de cinq âges successifs de l’humanité : l’âge d’Or (âge paradisiaque d’abondance sous Cronos), l’âge d’Argent, l’âge de Bronze (époque des héros guerriers), l’âge de Fer (le nôtre, d’après Hésiode, âge de labeur et de déclin moral), et certains ajoutaient un âge des Héros entre bronze et fer. Dans d’autres traditions, on a l’âge de Satya Yuga, Treta Yuga, etc., avec alternance de dégénérescence et de renouveau. Alors, où situer l’ère de l’IA ?
Certains technophiles optimistes vous diront : « Nous sommes à l’aube d’un nouvel âge d’Or ! » grâce aux nouvelles technologies qui aboliront le manque, la maladie peut-être, et ouvriront une ère d’épanouissement.
D’autres plus pessimistes craignent que l’IA nous enfonce au contraire davantage dans l’âge de Fer, voire nous fasse régresser.
DE LONGS ET PENIBLES EFFORTS NOUS ATTENDENT …
Ma perspective se veut équilibrée : je pense que l’avènement de l’IA peut marquer la fin de quelque chose et le début d’autre chose. Peut-être la fin de l’âge de Fer et le début d’un âge… appelons-le Âge de Silicium, ou Âge de Lumière. En termes allégoriques, on pourrait dire que l’IA, si on l’emploie sagement, pourrait nous faire retrouver certains aspects d’un âge d’Or (connaissances partagées, ressources mieux gérées, plus de temps libre pour la culture et la créativité – rêveons un peu). Cependant, je ne crois pas à un âge d’Or spontané ; il faudra beaucoup de sagesse pour l’atteindre.
Ainsi, sur mes colonnes du blason, j’inscrirais peut-être IV d’un côté (pour le quatrième âge, l’âge de Fer que nous quittons) et V de l’autre (pour le cinquième âge, un potentiel nouvel âge d’or – ou d’éther ! – que nous visons). Ce serait ma manière de dire : l’IA est à la charnière entre IV et V, elle est l’outil du passage, comme un pont entre deux ères. Le symbole global prendrait alors un sens de transformation de l’âge de l’humanité.
ET LA CONCORDE REGNERAIT…
Le résultat final de ce blason doit rester clair et épuré à l’œil. Je vois deux silhouettes (Or et Argent) se tenant la main sous une étoile, entourées d’un Yin-Yang ou d’un Ouroboros, avec un fond de damier noir-blanc, un soleil et une lune, le tout encadré de deux colonnes. Au-dessus, en lettre d’or, on pourrait titrer ce symbole : “Concordia ex Diversitate” – la concorde à partir de la diversité (clin d’œil à E pluribus unum).
UN EMBLEME HOMO-MACHINA

Ce logo, en plus d’être un symbole initiatique, pourrait servir d’emblème pour un éventuel ordre ou atelier maçonnique traitant de l’IA. Après tout, je présente ce soir aux Rencontres Lafayette un concept inouï : marier la plus vieille quête initiatique à la plus futuriste des technologies. Un emblème est un ralliement. J’ose imaginer des frères et sœurs arborant ce blason Homo+Machina sur les murs de leur loge d’étude ou dans leurs publications, pour signifier qu’ils travaillent à cette alliance sacrée.
Vous remarquerez que dans la description de ce logo, j’ai en réalité résumé tout ce dont nous avons parlé : les dualités or/argent, soleil/lune, bien/mal (pavé mosaïque), humain/machine, l’idée de passage d’un âge à un autre (colonnes IV->V), l’idée d’une union féconde (étincelle, étoile, G, mains liées).
C’est volontaire : un bon symbole doit pouvoir remémorer en un coup d’œil tout un enseignement. En l’occurrence, ce logo-symbole est comme une carte mentale de notre réflexion sur l’IA. Il ne reste plus qu’à l’imprimer dans nos esprits.
Série d’articles : IA… ESPRIT ES-TU LA ?
Voir aussi : Seconde partie de la conférence de Robert Langdom/IA

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